Petit compte-rendu de la sortie "libellules" du 20 septembre 2008 à l'étang de la Porte Baudet ou des Maurus

Le rendez-vous était fixé à 10h00 au parking de la porte Baudet. Les retardataires enfin arrivés et le petit trajet jusqu'à l'étang parcouru, il est 10h30 quand nous nous approchons de l'eau. Le soleil brille dans un ciel sans nuage mais il fait encore un peu frais pour voir apparaître les premiers Odonates.

Je ne suis pas devin, mais j'avais un peu prévu cette fraîcheur matinale. Ne le répétez à personne, hier, dans l'après-midi, je suis venu ici et j'ai capturé un exemplaire de chaque espèce qui fréquentait le site. Avec mille précautions, j'ai emprisonné chaque individu dans une "papillote", petite enveloppe de papier cristal. Et ce matin, en attendant que nos libellules se dégourdissent les ailes et commencent leurs gracieuses évolutions, je présente mes 5 prisonniers de la veille :

- un mâle de Leste vert Chacolestes viridis,

- un mâle et une femelle d'Agrion élégant Ischnuran elegans,

- un mâle d'Aeschne bleue Aeshna cyanea,

- un mâle de Sympétrum rouge sang ou S. sanguin Sympetrum sanguineum.

Après quelques instants d'émerveillement devant la beauté des motifs et des couleurs, nous comparons les tailles : l'Aeschne bleue, un des plus grands Anisoptères de nos régions (près de 7 cm de longueur totale), avec un des plus petits Zygoptères l'Agrion élégant (seulement 30 mm environ). Nous pouvons aussi mettre côte à côte un petit Anisoptère à l'abdomen épais et aux ailes à plat au repos, le Sympétrum rouge sang qui, au maximum, ne mesure que 39 mm de long et le Leste vert, grand Zygoptère à l'abdomen long et mince et aux ailes à demi- étalées, et qui peut atteindre 48 mm de longueur . Nous constatons donc que la taille n'est pas un critère de distinction entre les deux sous-ordres d'Odonates.

Dès que la température s'est un peu réchauffée, nous rendons la liberté aux 5 prisonniers. Après quelques instants de récupération, ils prennent leur envol et s'empressent de s'éloigner, sans doute pour se remettre de leur stress dans un endroit plus tranquille. Il est certain que cette détention arbitraire est à proscrire. Je ne recommencerai plus, c'est promis.

L'ambiance chaude et très agréable de la fin de matinée et du début d'après-midi, va nous permettre de contacter enfin des libellules "libres".

Tout d'abord, nous rencontrons deux "vieilles connaissances":

- un mâle de Leste vert que nous observons un peu à l'écart de l'eau, à l'ombre, perché sur de hautes herbes . La femelle de cette espèce insère ses œufs dans les rameaux d'arbustes à bois tendre, poussant près de l'eau (saules, aulnes...),

- plusieurs couples de Sympétrum rouge sang qui sont en pleine activité reproductrice. La ponte a lieu en vol, en tandem, le mâle précédant la femelle qu'il tient accrochée par la tête à l'aide de ses appendices anaux. À quelques mètres de l'eau mais à moins d'un mètre du sol, tout au long d'un parcours zigzagant, la femelle lâche ses œufs à la volée au-dessus des herbes humides.

Par la suite, nous allons "découvrir" 3 nouvelles espèces, 1 Zygoptère et 2 Anisoptères :

- un mâle d'Agrion porte-coupe Enallagma cyathigerum

- un mâle d'Aeschne mixte Aeshna mixta

- un mâle de Sympétrum strié ou S.fascié Sympetrum striolatum

Alors que l'abdomen du mâle d'Agrion élégant est tout noir à l'exception du petit lumignon bleu du 8ème segment, celui de l'Agrion porte-coupe est surtout bleu pur avec des zones noires sur certains segments. Le second segment est bleu avec un petit dessin noir en forme de champignon.

Le mâle d'Aeschne mixte est un peu plus petit et de couleurs un peu moins vives que celui de l'Aeschne bleue. C'est quand même une superbe bête, avec son thorax brun orné, latéralement, de deux bandes jaunâtres et son abdomen décoré d'une mosaïque de taches colorées.

Les mâles de ces deux grandes libellules semblent infatigables. À la recherche d'une femelle, pour s'accoupler, ils patrouillent sans relâche sur le pourtour de l'étang, avec de temps en temps des séances de sur place. Peu farouches, ils peuvent venir frôler l'observateur immobile et bien placé. Ce dernier peut alors admirer, sans les capturer, ces merveilleuses machines volantes.

Les deux Sympétrums sont de dimensions très proches, mais S. strié est farouche et se laisse difficilement approcher, alors que S. rouge sang, plus familier, vient parfois se percher sur le filet du chasseur.

Alors que le mâle de Sympérum rouge sang est rouge vif avec un abdomen en massue, celui de Sympétrum strié est d'un rouge plus terne avec un abdomen cylindrique. Autres différences : le premier a les pattes toutes noires et le thorax entièrement rougeâtre, les pattes du second sont rayées de jaune et son thorax est orné, latéralement, de deux bandes jaunâtres encadrant une bande rouge.

Nous ne rencontrerons pas de couple de Sympetrum strié en train de pondre. Eût-ce été le cas, nous aurions constaté la même formation en tandem que S. rouge sang et le même mouvement nerveux et saccadé de la femelle lâchant ses œufs. Mais pas au-dessus de l'herbe humide cette fois, au-dessus de l'eau libre.

Bien évidemment, les 7 espèces que nous avons observées aujourd'hui ne représentent qu'une partie de la richesse odonatologique potentielle de l'étang de la Porte Baudet. Certaines d'entre elles pourront y être présentes pendant quelques semaines encore. Par contre, il était un peu tard pour pouvoir rencontrer d'autres espèces susceptibles de fréquenter le site, mais dont la période de vol est terminée depuis quelques temps déjà. Alors...

Alors il faudra revenir l'année prochaine, au cœur de "la saison des libellules". Rendez-vous donc, en 2009, ici ou ailleurs, en juin ou en juillet ou en août. Nous en reparlerons.

Edouard Dieu